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Andry Rajoelina ne veut pas démissionner, selon Africa Intelligence

Cet article a été publié par le journal en ligne Africa Intelligence aujourd’hui, à 17h15, heure française.

Alors que le lieu où il se trouve demeure toujours secret, le président Andry Rajoelina a tenu une réunion à distance avec son cabinet dans la matinée du 13 octobre, réaffirmant sa capacité à gouverner. Dans le même temps, il a mené tout au long du week-end une série de consultations avec plusieurs de ses homologues du continent afin de s’assurer de leur soutien.

Au petit matin de ce 13 octobre, le cabinet du président Andry Rajoelina a convoqué une réunion d’urgence à distance. Organisée via WhatsApp, elle a réuni ses plus proches collaborateurs. Le chef de l’État y a précisé la teneur de son allocution prévue dans la soirée : il ne démissionnera pas.

Sans indiquer à son premier cercle le lieu où il se trouvait, Andry Rajoelina a simplement évoqué avoir été contraint d’opérer un « repli stratégique », motivé par la nécessité de protéger sa vie et celle de sa famille. Une manière d’avouer à demi-mot qu’il aurait quitté Madagascar, alors que les rumeurs de son départ de la Grande Île se sont largement répandues tout au long de la journée du 12 octobre. Selon RFI, le président aurait été exfiltré par un avion de l’armée française. Depuis le 11 octobre, le président malgache était cloîtré au palais d’État avec son épouse et ses trois enfants (AI du 11/10/25).

Lors de cette réunion matinale, Andry Rajoelina a également indiqué qu’il entendait, dans son discours, répondre aux accusations d’abandon de poste que pourrait formuler la Haute Cour constitutionnelle (HCC), et les réfuter publiquement. Outre ces éléments de langage visant à rassurer son entourage sur sa capacité à gouverner, il a réaffirmé que l’ordre constitutionnel devait être respecté. En filigrane, le président malgache a également agité le spectre de la crise de 2009 qui avait suivi le putsch l’ayant placé au pouvoir de la Haute Autorité de transition (HAT). Cette période de transition politique, marquée par une grave crise économique et le retrait des principaux bailleurs internationaux, avait durement marqué le pays.

Ramaphosa, Assoumani, Lourenço…

Au cours des dernières 48 heures, le chef de l’État a par ailleurs échangé avec plusieurs de ses homologues du continent auxquels il a également fait part de son refus catégorique à démissionner. Dès la matinée du 11 octobre, alors que les premières rumeurs de mutinerie circulaient dans la capitale, plusieurs chefs d’État du continent ont pris l’initiative d’appeler le président malgache. L’un des premiers à le faire a été le Sud-Africain Cyril Ramaphosa, auprès duquel Andry Rajoelina a tenté de se montrer rassurant.

Tout comme l’Afrique du Sud, Madagascar est membre de la Southern African Development Community (SADC), dont la présidence tournante de l’organisation est assurée par Andry Rajoelina (AI du 17/02/25). Un état de fait qui complique les velléités d’intermédiation de l’organisation dans la crise malgache.

Cyril Ramaphosa n’est pas le seul membre de la SADC à avoir échangé avec le président malgache : les chefs d’État comorien Azali Assoumani et mauricien Dharam Gokhool ont également pris contact avec lui. Dans un communiqué, les autorités mauriciennes ont par ailleurs dénoncé l’arrivée sur leur sol de l’homme d’affaires Mamy Ravatomanga, ancienne éminence grise d’Andry Rajoelina, et de l’ancien premier ministre Christian Ntsay, le 12 octobre, en soulignant que les conditions de leur arrivée n’étaient pas claires.

Président en exercice de l’Union Africaine (UA), le chef de l’État angolais João Lourenço suit également la situation de près. Dans un communiqué publié le 12 octobre, le président de la Commission de l’UA, Mahamoud Ali Youssouf, a réitéré la position de l’organisation, appelant à un règlement de la crise « dans le respect de la Constitution et des institutions établies ».

Appel téléphonique avec Emmanuel Macron

Côté ouest-africain, le président bissau-guinéen Umaro Sissoco Embaló s’est aussi entretenu avec Andry Rajoelina, lui apportant son « soutien franc ». L’ancien président sénégalais Macky Sall, proche du chef de l’État malgache, a tenu lui aussi à l’appeler pour lui témoigner son appui.

Andry Rajoelina s’est par ailleurs entretenu dans le week-end avec le président français, Emmanuel Macron. Son exfiltration a-t-elle été évoquée durant cet échange téléphonique ? Hasard ou non, le 12 octobre, un décret signé de la main d’Andry Rajoelina et « portant octroi d’une remise gracieuse de peine à titre exceptionnel » a été accordé à plusieurs prisonniers politiques, dont le Franco-Malgache Paul Maillot Rafanoharana et le Français Philippe François, tous deux soupçonnés par les autorités malgaches d’avoir fomenté à l’été 2021 un coup d’État, sous le nom de code « Apollo 21 », contre le président Andry Rajoelina (voir notre couverture). Ce n’était pas le premier échange entre ce dernier et Emmanuel Macron depuis le début de la crise : durant la première dizaine du mois d’octobre, les deux hommes se sont déjà parlé à au moins une reprise.

Si avec ses homologues, Andry Rajoelina a à chaque fois tenté de se montrer rassurant, affirmant que la majorité de l’armée lui restait fidèle, son affirmation est largement démentie par plusieurs hauts gradés et ce alors que le Corps d’administration des personnels et services de l’armée de terre (Capsat), à travers le colonel Mickaël Andrianirina, a désigné le général Démosthène Pikulas comme nouveau chef d’état-major, remettant en cause l’autorité officielle du président sur l’armée.

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