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Voilà pourquoi la prétendue Refondation de Madagascar est déjà un échec

Madagascar : la fausse refondation après la fuite de Rajoelina

Le 11 octobre 2025, Andry Rajoelina a pris la fuite. Il a quitté un pays affaibli, lessivé par des années de corruption, de décisions absurdes et de gabegie. Beaucoup de Malgaches ont cru que ce départ ouvrirait enfin la voie à un renouveau courageux. Une refondation vraie, radicale, profonde. Mais quelques semaines plus tard, une réalité s’impose : le système ne s’est pas effondré. Il s’est recyclé.

Au lieu de rompre avec le passé, Madagascar semble glisser doucement vers la continuité du régime que tout le monde rejetait, mais avec d’autres visages et d’autres promesses. Rien qui ressemble à la rupture espérée.

Les mêmes réseaux, les mêmes méthodes

Dès les premiers jours, on a vu revenir dans les hautes sphères des figures connues : des partisans du régime orange, personnalités qui, hier encore, soutenaient les dérives de Rajoelina. La transition ne purge rien, ne restructure rien : elle réintègre, elle recompose, mais ne transforme pas.

Le cas le plus flagrant : la CENI. Cette institution, qui a servi à légitimer des élections contestées et à installer un pouvoir corrompu, n’est pas repensée. Au contraire, elle est consolidée. Comment parler de refondation quand on garde les outils qui ont permis les dérives du passé ?

Les projets absurdes continuent

Le peuple espérait une remise à plat générale, un arrêt immédiat des projets ruineux, inutiles et taillés pour la propagande. Mais non :

  • Le téléphérique, symbole d’un pouvoir déconnecté, continue d’exister alors qu’il n’a jamais répondu à un besoin réel. On maintient un projet hors de prix, énergivore, qui ne solutionne rien.
  • La pseudo autoroute Antananarivo–Toamasina, pourtant très contestée pour ses impacts sociaux et environnementaux, continue d’être poussée comme si rien n’avait changé.

Là encore, tout est clair : on préserve les jouets du pouvoir précédent. Aucune refonte de priorités, aucune réflexion sur les besoins urgents (santé, eau, routes locales, énergie). Simplement l’illusion du progrès, sans le progrès.

Une souveraineté introuvable

Un pays qui veut se refonder doit d’abord se libérer. Or, Madagascar poursuit docilement sa dépendance au FMI, à la Banque mondiale, et répète son attachement à des organisations où il ne joue aucun rôle d’influence (Union africaine, SADC, Francophonie, COI).

La rupture avec le néocolonialisme financier attendra. La refondation économique aussi. Le discours reste le même : tendre la main à l’extérieur, dépendre des aides, attendre les validations d’institutions qui dictent les politiques publiques depuis des décennies.

A quoi bon un nouveau régime si la ligne directrice ne change pas ?

Même la politique reprend ses vieux réflexes

Le nouveau président, Michael Randrianirina, évoque déjà la possibilité de se présenter aux prochaines élections. A peine arrivé, déjà tenté par la perpétuation du pouvoir. Une constante dans l’histoire politique malgache.

A cela s’ajoute le poids intact de l’Eglise dans les affaires de l’Etat. Dans un pays qui prétend se refonder, rien ne change : les autorités religieuses continuent d’orienter les décisions politiques, au lieu qu’un Etat souverain construise sa propre voie.

Seule lumière : la parole du peuple

Il faut toutefois reconnaître un changement précieux : le retour de la liberté d’expression. Aussi, le culte de la personnalité, qui avait atteint des sommets sous Rajoelina, s’est effondré. Les Malgaches osent parler, débattre, dénoncer.

C’est peut-être la seule vraie avancée de cette période. Mais elle ne suffira pas si elle n’est pas suivie d’actes.

Conclusion : refondation ou reconditionnement ?

Malheureusement, tout indique que Madagascar ne marche pas vers une refondation. Elle marche vers une continuité maquillée en transition. Les mêmes logiques, les mêmes structures, les mêmes influences… Seuls les noms changent.

Mais rien n’est perdu. Si le peuple a réussi à faire tomber un dictateur comme Andry Rajoelina, il peut exiger davantage. Le pays a déjà prouvé qu’il savait se lever. Reste maintenant à transformer cette énergie en véritable force politique : une force qui ne se contente pas de « nouvelles têtes », mais qui impose un nouveau système, conçu pour les Malgaches, par les Malgaches.

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1 Commentaire
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Analyste

C’est sûr qu’on ne fait pas du neuf avec du vieux !

Je pense qu’on se dirige vers une autre crise, qui aura lieu peut-être dans 5 ou 10 ans.

On est dans un cycle infernal d’échec parce qu’aucun dirigeant n’a assez de couilles pour faire une vraie rupture.

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