Pourquoi Michael Randrianirina n’est pas le bon choix pour la refondation de Madagascar
Madagascar est à un tournant de son histoire. Après des années de corruption systémique, de dépendance économique et de confiscation du pouvoir par des dirigeants cupides, la population réclame une vraie refondation, pas un changement de façade. Et pourtant, le colonel Michael Randrianirina, censé incarner cette « refondation », semble déjà s’enliser dans les vieux travers. Ce n’est pas un chef de rupture. C’est un gestionnaire de compromis. Et c’est précisément ce dont le pays ne veut plus.
Un homme sans cap, qui veut plaire à tout le monde
Dès les premiers jours, il a envoyé un signal fort : la dissolution des institutions les plus corrompues du pays — la HCC, la CENI, le Sénat, la HCJ, le HCDDED. Ce geste aurait pu marquer le début d’une ère nouvelle. Une rupture nette. Une respiration.
Mais à peine quelques jours plus tard, tout est annulé, les institutions « ressuscitent », les mêmes visages reviennent. Résultat : tout le monde a compris qu’il ne voulait fâcher personne. Ni les militaires, ni les politiciens, ni la communauté internationale. Son discours d’investiture sera d’ailleurs prononcé en français, signe de son attachement profond à la France.
Ce n’est pas ainsi qu’on refonde un pays. On ne rebâtit pas une Nation avec la peur de déplaire. Un dirigeant qui tergiverse à ce point ne réforme rien, il temporise, il rassure, il recolle les morceaux d’un système pourri.
Le Premier ministre des liaisons dangereuses
Le choix du Premier ministre, Herintsalama Rajaonarivelo, en dit long sur le manque de courage politique et de vision de Michael Randrianirina. Bras droit de l’oligarque Mamy Ravatomanga, ce choix sonne comme un retour aux affaires de l’ancien régime.
Avec tous les profils compétents et intègres que compte Madagascar, pourquoi a-t-il choisi un homme au profil douteux, dont les fréquentations relèvent du vieux réseau politico-financier karana et orange ? C’est un mauvais choix, une erreur stratégique, voire un signe de faiblesse.
Michael Randrianirina n’a pas non plus osé dissoudre l’Assemblée nationale, largement acquise à l’ancien régime, et qui lui a d’ailleurs proposé cette peau de banane portant le nom de Herintsalama Rajaonarivelo. Il a préféré maintenir la mascarade, quitte à sacrifier la promesse de refondation.
La continuité du système : allégeance aux bailleurs et dépendance perpétuelle
Ce qui se cache derrière cette nomination de Herintsalama Rajaonarivelo, c’est la soumission continue aux bailleurs de fonds. La justification donnée par Michael Rajaonarivelo — « ses relations avec les différentes organisations internationales qui travaillent avec Madagascar » — est une gifle au peuple malgache.
Depuis des décennies, ces bailleurs dictent les politiques publiques, imposent leurs réformes, leurs conditionnalités, leurs modèles économiques rapaces sans scrupules. Résultat : pauvreté chronique, dépendance structurelle, fuite des richesses.
Et voilà que Michael Rajaonarivelo sert le même discours : « Il faut négocier avec eux. » Non, au contraire, notre rédaction ne le répètera jamais assez, il faut s’en libérer !
Madagascar n’a pas besoin d’aumônes ni de prêts toxiques. Le pays a des terres, des ressources, un peuple travailleur. Ce qu’il lui faut, c’est un modèle de développement fondé sur la souveraineté — pas sur la soumission. Michael Randrianirina, lui, a choisi la facilité : garder les circuits de l’ancien monde en place, pour ne pas risquer la rupture.
Un homme d’église au pouvoir : le risque du « fihavanana politique »
Le colonel Randrianirina est un homme de foi, et nul ne conteste la sincérité de sa démarche spirituelle. Mais en politique, le pardon peut devenir une arme à double tranchant.
Sous couvert de « fihavanana », il risque de tendre la main à ceux qui ont pillé, menti, détruit. Au nom de la réconciliation, il va rouvrir la porte aux anciens du régime, aux affairistes, aux manipulateurs. Et petit à petit, ils reprendront leur place, jusqu’à étouffer toute tentative de refondation.
Madagascar n’a pas besoin d’un « pardon » collectif : il a besoin d’une épuration démocratique, d’une purge morale et institutionnelle. Il faut tourner la page, oui — mais en la brûlant, pas en la relisant.
L’urgence : suspendre le jeu politique et repenser le système
Au risque de nous répéter encore une fois, Madagascar n’a pas besoin de se précipiter pour former un gouvernement. Regardez la Belgique : le pays a fonctionné pendant plus de 500 jours sans gouvernement, avec des technocrates gérant les affaires courantes. Et ça a très bien marché. Pourquoi pas Madagascar ?
Ce qu’il faut, ce n’est pas un gouvernement bancal recyclant les mêmes visages, mais une période de transition claire et réfléchie, où :
– Des technocrates neutres assurent la gestion quotidienne du pays ;
– Une Assemblée citoyenne de refondation travaille en parallèle sur un nouveau contrat social ;
– Les anciens réseaux sont tenus à distance ;
– Le peuple participe à la reconstruction du modèle, sans interférences extérieures.
Certes, un tel processus prend du temps — mais il est nécessaire et prépare à un avenir plus radieux. A l’inverse, ce que fait Michael Randrianirina, c’est précipiter la continuité du système sous un vernis de réforme.
Conclusion : la rupture totale ou rien
Michael Randrianirina ne conduit pas une refondation. Il orchestre un recyclage. Sous prétexte de respecter une Constitution qui ne protège pas les intérêts de Madagascar, il ressuscite de vieilles structures corrompues ; sous bannière de refondation, il maintient la dépendance.
Le constat est simple : Madagascar n’a pas besoin d’un colonel hésitant, ni d’un gouvernement de compromis. Il lui faut un moment de suspension, une respiration nationale, où les affaires courantes sont gérées avec rigueur, pendant qu’on repense les fondations mêmes du pays.
Tant que cette rupture totale n’aura pas lieu, rien ne changera. Et c’est précisément pour cela que Michael Randrianirina n’est pas l’homme de la refondation.
Merci pour cet article encore une fois très pertinent.
Je me pose une question : où est passé la Gen Z ? On ne les entend plus du tout, on dirait qu’ils ont complètement disparu de la circulation.
Est-ce qu’ils voulaient juste le départ de Rajoelina sans se soucier de la suite ? A mon avis, ils devraient s’impliquer un minimum, parce que ce nouveau gouvernement est en train de les entuber.
Il est en train de faire de la lèche avec la SADC