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« Andry Rajoelina, le maître des désillusions », dixit Le Monde

« Andry Rajoelina, le maître des désillusions », titre le journal Le Monde dans son édition du 22 juillet 2022. Ecrit par Laurence Caramel, envoyée spéciale à Antananarivo, l’article dresse un portrait peu élogieux et un bilan présidentiel désastreux du locataire d’Iavoloha. Voici quelques extraits choisis.

« A dix-huit mois de la fin de son mandat, le président continue de faire des promesses tous azimuts alors que la Grande Ile s’enfonce un peu plus dans la misère. »

« L’épreuve du bilan approche pour celui qui a promis de rattraper en cinq ans le retard accumulé au cours des six décennies qui se sont écoulées depuis l’indépendance, en 1960. L’audacieux « TGV » est pourtant loin d’être quitte de ce passé dont il a écrit une des pages sombres en renversant le président Marc Ravalomanana avec le soutien de l’armée, en 2009. »

« Mais les lendemains du putsch sont amers. Le pays plonge pour cinq années dans un régime dit « de transition », marqué par une sévère régression sociale, la prolifération des trafics de ressources naturelles et un isolement diplomatique. Madagascar affiche alors les pires indicateurs de gouvernance. »

« En 2018, dans le rôle du revenant repenti, le candidat s’est présenté en homme nouveau, mûri par l’exil et le temps. Mais en professionnel de la communication, il a dépensé des millions d’euros pour déployer une campagne hors normes et, surtout, il a énormément promis. »

« Une tout autre réalité s’est pourtant imposée. La pauvreté, déjà immense, s’est aggravée et atteint un niveau jamais égalé pour ses 27 millions d’habitants. Huit personnes sur dix vivent avec moins de 8 600 ariary par jour, a révélé fin mai la Banque mondiale, soit en dessous de 2,15 dollars, le nouveau seuil de pauvreté retenu par les institutions internationales. »

« Sans se soucier de passer pour un illuminé, il n’a pas hésité à se lancer dans l’aventure hasardeuse du Covid-Organics (CVO) après avoir donné crédit au présage d’une prophétesse brésilienne annonçant qu’un remède malgache allait sauver le monde. »

« Andry Rajoelina a réquisitionné plusieurs entreprises privées et les services de l’Etat pour faire fabriquer cette tisane à base d’artemisia. Les circuits financiers mobilisés pour monter l’opération sont restés dans une totale opacité, alors que dans le même temps, le personnel de santé manquait de tout pour prendre en charge les personnes contaminées. »

« Un rapport de la Cour des comptes, publié le 18 février sous la pression des bailleurs de fonds étrangers et portant sur la gestion des 400 millions de dollars (environ 325 millions d’euros à l’époque) octroyés en 2020 pour faire face à la pandémie, a mis au jour d’importants dysfonctionnements et des pratiques embarrassantes pour la présidence : paiements en espèces, absences de pièces justificatives, suspicion de prestations fictives et de conflits d’intérêts… »

« Quelque 2,2 milliards d’ariary, soit environ 600 000 dollars, ont servi à l’achat de feuilles d’Artemisia annua à Bionexx. Aujourd’hui, le CVO est vendu en gélules dans les pharmacies et proposé dans les hôpitaux. Ce n’est ni le succès commercial ni le succès diplomatique escompté. Et aucune étude scientifique indépendante n’a démontré son efficacité. »

« Madagascar avait officiellement déclaré un peu moins de 66 000 cas de Covid-19 et 1 400 décès mi-juillet. Ces chiffres ne reflètent pas la réalité. « Dans les hôpitaux d’Antananarivo, au début de la pandémie, les médecins ont reçu ordre de ne pas enregistrer tous les décès », rapporte l’un d’eux, sous couvert d’anonymat. »

« La tisane n’est pas la seule extravagance à mettre au bilan du président. Sur la colline sacrée d’Antananarivo, il a fait édifier dans l’enceinte du Rova, où vivaient les souverains merina jusqu’au XIXe siècle, un amphithéâtre en béton de 400 places pour y donner des spectacles sur l’histoire de Madagascar. Les descendants de la noblesse et les amoureux du patrimoine crient à la profanation en fustigeant le mauvais goût du parvenu. A-t-il pris conscience de sa bévue ? Le colisée n’a jamais été utilisé. »

« La construction d’un téléphérique pour désengorger la capitale, mais qui sera inaccessible par son coût à la majorité des habitants, a aussi soulevé les critiques. « Le président n’a pas su bien s’entourer », accable un ancien ministre avec une pointe de mépris pour le « petit », son autre sobriquet – qui n’est pas toujours rempli d’affection : « Les gens intelligents le lassent vite. Sa vision du développement est restée infantile. Il veut un téléphérique ou un stade olympique à Antananarivo, comme il voudrait un train électrique, sans se soucier de dépenser des fortunes colossales au milieu de la misère. » »

« Tous ceux qui le côtoient, sans lui être obligés, déplorent « un exercice du pouvoir centralisé à l’extrême mais dépourvu de stratégie et de vision ». »

« Derrière une image lisse et maîtrisée, la personnalité du chef de l’Etat demeure difficile à cerner. Les observateurs dépeignent tantôt un « autocrate mégalomane », tantôt un homme indécis, ballotté entre des influences contraires au sein de son proche entourage. »

Le projet de loi sur la protection des lanceurs d’alerte, ébauché en 2018, a été enterré. « Les lanceurs d’alerte sont en péril. Ils sont harcelés et poursuivis en justice, surtout lorsque leurs actions mettent en cause des personnalités politiques et économiques influentes », affirme Ketakandriana Rafitoson, la directrice exécutive de Transparency International à Madagascar. »

« Les institutions mises en place sous le mandat du précédent président, Hery Rajaonarimampianina, pour lutter contre la corruption et le trafic de ressources naturelles ont été affaiblies. »

« Dans ce climat délétère, les relations entre les bailleurs de fonds étrangers et le locataire du palais d’Iavoloha oscillent entre méfiance obligée et hostilité à peine masquée. « Tout le monde est fatigué de Madagascar », résume sans détour l’un d’entre eux. »

« Alors que le pays s’enfonce, la Banque mondiale a adressé un avertissement à peine voilé en exhortant Madagascar à un « nouvel élan de réformes pour redresser la barre ». Le long chapitre consacré à l’éducation témoigne de l’inquiétude que suscite l’avenir du pays. L’institution internationale pointe le manque de formation des enseignants, dont 80 % n’ont pas le diplôme requis, des rémunérations insuffisantes et des recrutements peu transparents. »

Plutôt que de s’attaquer à cette situation qui hypothèque le développement du pays, Andry Rajoelina a préféré lancer un programme de construction d’écoles dites « aux normes », dont il a supervisé les plans. Leur coût serait de 40 % plus élevé que le modèle résistant aux cyclones jusqu’alors sélectionné par le ministère de l’éducation, qui n’a pas eu son mot à dire. Il a aussi imposé qu’une partie des bâtiments soient peints en orange, sa couleur. Comme cela est devenu la règle pour tous les nouveaux édifices publics, petits ou grands. »

« En 2020, les institutions multilatérales et les bailleurs de fonds bilatéraux ont versé 1,3 milliard de dollars, soit près du double qu’en 2019, selon les données les plus récentes de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). »

« Tout-puissant ? Derrière les apparences, TGV se sait en réalité fragile et la crainte d’un coup d’Etat demeure présente. En juillet 2021, l’affaire dite « Apollo 21 », du nom d’un complot présumé contre le président et ses proches, a eu valeur d’avertissement. »

« Dans l’opposition, le vétéran Marc Ravalomanana, 72 ans, ne masque plus son envie de remonter sur le ring pour prendre sa revanche. L’ancien chef de l’Etat met déjà en garde contre la partialité de la Haute Cour constitutionnelle (HCC) et de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) après les récentes nominations de personnalités proches du régime. « Ces pratiques ne permettent pas d’organiser des élections libres, neutres et équitables », condamne-t-il en agitant les risques de conflit pré ou post-électoral. En attendant, plusieurs de ses meetings ont été interdits sans réel motif. »

Source : Le Monde

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Analyste

Merci beaucoup pour cet article, c’est très intéressant. La journaliste a raison, TGV se sait fragile et il a peur d’un coup d’Etat, c’est pour cela qu’il envoie tout le temps l’Emmoreg dès qu’il y a une manifestation. N’importe laquelle d’ailleurs, que ce soit une manif de consommateurs ou d’opposants politiques, tout le monde passe sous les balles et les bombes lacrymo de l’Emmoreg.

Aujourd’hui, une manif autorisée par le préfet a été empêchée par l’Emmoreg envoyé par Andry Rajoelina. Il vient de faire arrêter Rina Randrimasonoro, le SG du TIM.

MDRM

Article à garder précieusement dans les archives pour enseigner l’Histoire aux futures générations. Merci LE MONDE ! Merci Laurence Caramel et merci Koolsaina pour les extraits !

Lova

« Andry Rajoelina est un autocrate mégalomane! Sa vision du développement est resté infantile. Il exerce un pouvoir centralisé à l’extrême mais dépourvu de vision et de stratégie ».

Juste ça comme extrait, ça suffit. Voilà à quel personnage médiocre on a affaire. Rajoelina est le président le plus nul d’Afrique, et le Monde entier le sait 🙂 il est plus nul que les jeunes leaders islandaises (des trentenaires alors que lui il a 50 ans) et plus nul que Ravalomanana bien sûr.

RANDRIA

En résumé c’est un CON…….

Mpandalina

ça nous change de la gazette de la grande île qui passe leur temps à lécher le cul d’Andry Rajoelina en l’appelant leur « leader bien aimé » ou encore leur « mamimbahoaka » ! Au moins avec Le Monde, ils appellent Rajoelina « l’autocrate mégalomane ». C’est ça la vérité! Rajoelina n’a jamais été un leader bien aimé mesdames et messieurs de la gazette an!

agrovahaza

C’est du deuxième degré, évidemment qu’ils se moquent de lui !

Mpandalina

Non c’est pas du tout du deuxième degré, la gazette de la grande île fait de la lèche à Rajoelina parce qu’ils ont déjà reçu une bombe sur leur local et ils ont peur que ça recommence s’ils commencent à écrire comme Le Monde. C’est pour ça que la gazette n’ose pas provoquer Rajoelina et le lèche en l’appelant leur « leader bien aimé » ou « mamimbahoaka ». Ils devraient juste l’appeler Andry Rajoelina s’ils ont peur, et pas jusqu’à lui faire du lèche cul comme ça. ça les rend pas crédible à force. En tout cas, moi je dis MERCI LE MONDE ! « Autocrate MEGALOMANE », voilà la vraie vérité.

Antsa

Vous n’avez pas lu l’article où la gazette de la grande île remercie Rajoelina pour avoir augmenté le prix de l’essence ? Ces pseudo journalistes solelakistes ont dit que c’est une très bonne solution contre les embouteillages à Tana ! plus stupides que la gazette tu meurs ! le 4ème pouvoir est censé réveiller les consciences et au lieu de ça, on ne lit que de la lèche avec Rajoelina sur la gazette. Par contre, dès qu’il s’agit de Lalatiana et Rinah, ça se permet de les insulter mais à côté, ça suce Rajoelina à toutes les sauces. La gazette = pseudo journalisme poubelle

Mpandalina

Eh oui, la gazette de la grande île aime bien lécher le cul de Rajoelina. Peut-être que le gout du cul de « leur leader bien aimé » leur plait. Hihi

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