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Amnesty International interpelle les autorités malgaches sur le respect des droits de chaque citoyen

Amnesty International a publié un communiqué hier (5 août 2020) sur la situation à Madagascar en ces temps de pandémie de coronavirus. Voici le courrier intégral.

« AMNESTY INTERNATIONAL
LE 5 AOUT 2020
DÉCLARATION PUBLIQUE

Madagascar : Les autorités ne doivent pas utiliser la lutte contre le COVID-19 comme prétexte à la répression des droits humains. Amnesty International demande aux autorités de cesser de donner les mesures de lutte contre la pandémie de COVID-19 comme excuse pour sanctionner les médias, les figures de l’opposition ou toute personne critiquant les actions du gouvernement. Les autorités doivent garantir le respect total et effectif des droits humains de chaque citoyen, y compris les droits à la liberté d’expression, de réunion pacifique et la liberté de la presse.

Le 16 juillet, Harry Laurent Rahajason, ancien ministre de la communication sous l’administration de Hery Rajaonarimampianina et figure de l’opposition, a été arrêté et placé en détention préventive dans la prison d’Antanimora, dans la capitale. Rahajason, également connu en tant qu’ancien journaliste sous le pseudonyme de « Rolly Mercia », a été accusé de complicité d’atteinte à la sécurité de l’État, après avoir été accusé d’avoir organisé et financé une manifestation. Ladite manifestation, interdite en raison de l’état d’urgence, appelait à la libération d’un dirigeant étudiant, Berija Ravelomanantsoa, placé en détention préventive depuis le 8 juin. Harry Laurent Rahajason attend toujours de connaître la date de son procès. Suite à son arrestation, le parti d’opposition HVM, auquel Rahajason appartient, a demandé sa libération immédiate. Il s’agit là de la dernière d’une série d’arrestations qui ont eu lieu depuis le début de l’année et qui indiquent une tendance à criminaliser systématiquement les voix dissidentes ou critiques, en particulier dans le contexte des efforts du gouvernement pour riposter au COVID-19.

Le 4 avril, la journaliste Arphine Helisoa a été arrêtée et envoyée en détention préventive après avoir été accusée de diffusion de fausses nouvelles et d’incitation à la haine envers le président, Andry Rajoelina. À la faveur d’une grâce présidentielle accordée aux journalistes en prison, elle a finalement été libérée le 4 mai après avoir passé un mois en détention préventive. C’est la deuxième fois qu’Arphine Helisoa, perçue comme proche de l’opposition, est accusée de diffusion de fausses nouvelles par les autorités judiciaires de Madagascar. Elle a également été inculpée en septembre 2019.

Le 8 avril, un présentateur de télévision a également été envoyé en détention préventive, accusé d’avoir diffusé de fausses nouvelles sur les réseaux sociaux au sujet du nombre de cas de COVID-19. Concernant les cas de la journaliste Arphine Helisoa et de la présentatrice de télévision, la ministre de la communication et de la culture, Lalatiana Rakotondrazafy, a déclaré à RFI que les deux femmes étaient accusées non pas en tant que journalistes, mais en tant que personnes individuelles.

Le 16 avril, Reporters sans frontières (RSF) a dénoncé le bâillonnement d’une chaîne de télévision d’opposition, Real TV, le 6 avril. La chaîne devait rediffuser une interview de l’ancien président Marc Ravalomanana, rival de longue date de l’actuel président, dans laquelle Ravalomanana critiquait la gestion par le gouvernement de la pandémie de COVID-19. Mais l’émetteur et l’antenne de la chaîne ayant été endommagés, l’interview n’a pas pu être diffusée. Selon la déclaration de RSF, cela est « d’autant plus inquiétant que cela est arrivé peu de temps après que Real TV et deux autres médias d’opposition (…) ont reçu un avertissement officiel du ministère de la communication et de la culture concernant leur couverture du coronavirus, y compris leur non-retransmission en direct des bulletins d’information des médias d’État sur la pandémie ». L’avertissement faisait également référence à l’interview diffusée initialement le 25 mars et dans laquelle Ravalomanana déclarait que le gouvernement avait trop tardé à fermer les frontières du pays et qu’il ne pouvait pas gérer la crise tout seul. Le ministère a déclaré que l’interview constituait une « incitation à la haine envers les autorités et à la désobéissance civile ».

RSF a demandé au gouvernement malgache de veiller à ce qu’une enquête approfondie et impartiale soit menée afin d’identifier les responsables présumés. Depuis l’apparition du COVID-19, le gouvernement malgache a pris des mesures répressives pour contrôler les informations partagées par les médias et les personnes. La loi 91-011 de 1991 relative aux situations d’exception, prévoit la réquisition de tous les médias (radios et télévisions) qui doivent uniquement partager les informations officielles. Parmi les autres mesures restrictives, on peut citer l’interdiction pour les stations de radio de diffuser des émissions au cours desquels le public peut appeler. Ces mesures porteront certainement atteinte à l’exercice du droit à la liberté d’expression et à la liberté de la presse. Dans une déclaration publiée le 19 mars 2020, le bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, tout en reconnaissant la nécessité pour les gouvernements de lutter contre la désinformation, par exemple en fournissant des informations fiables, a appelé les gouvernements à éviter la criminalisation des informations relatives à la pandémie, notamment en raison de l’effet dissuasif qu’elle aurait sur la liberté d’expression. »

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Analyste

Vraiment, on n’a jamais eu une aussi mauvaise image qu’avec Radomelina. Et le détournement des dons au profit de l’association Fitia et des potes pour faire du business de CVO, ils n’en parlent pas chez Amnesty international ?

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